Chef-Pilote Farman
1913-1949
Lucien Coupet est né le 4 octobre 1888 à Issoudun. Apprenti serrurier, il effectue son tour de France comme compagnon du Devoir de 16 à 21 ans et devient ajusteur chez de Dion-Bouton. Après un service militaire à Brest dans l’artillerie coloniale, de Dion-Bouton l’emploie au montage des moteurs d’avions puis, en 1913, comme mécanicien du marquis de Larreinty-Tholozan, son neveu, qui essaie les moteurs de la firme sur un Maurice Farman à Toussus-le-Noble. Lucien Coupet obtient son brevet de pilote le 26 juin 1914 (n°166 l) et le brevet militaire (n°67 l) le 29 janvier 1915. Affecté à la MF25, il effectue 160 missions dont 145 bombardements de nuit et 11 combats aériens. Sous-lieutenant en 1916, il est déjà titulaire de quatre citations, de la Médaille militaire et de la Légion d’honneur. Abattu en territoire ennemi avec son frère Léon, mécanicien de tous ses vols, au cours d’une mission le 6juillet 1917, il tente de s’évader en vain à trois reprises et profite de sa captivité pour se perfectionner à la navigation aérienne avec Albert Senouque, également prisonnier et beau-frère de Maurice Farman. Il entre chez Farman le 7 avril 1919 comme pilote d’essais. Il est co-pilote du Goliath, avec Bossoutrot, lors du raid Paris-Dakar en août 1919. Fin 1919, la société
Farman l’envoie bâtir la Compagnie aérienne cubaine avec ses compagnons de la MF25 dont son frère Léon et Guy de Roig. À son retour, il dirige les écoles de pilotage, assure la mise au point des prototypes, participe à l’ouverture des premières lignes commerciales vers l’Angleterre et le Danemark et concourt avec succès à de nombreux records mondiaux et Grands Prix. Nommé chef-pilote en 1926, il collabore en 1928, à l’établissement de la méthode de pilotage sans visibilité inventée par le directeur de l’aérodrome, Lucien Rougerie. Après la mort accidentelle de celui-ci, il est nommé directeur du terrain mais demande au bout d’un an à en être déchargé devant l’ampleur des tâches qui lui sont confiées et se concentre sur les essais de prototypes. Après la nationalisation de la Société Farman, il dirige le terrain de Toussus au titre de la SNCAC. En 1940, il organise le repli des avions sur Bordeaux et maintient, pendant l’Occupation, les compétences d’une petite équipe de spécialistes regroupés à Antibes sur le projet d’hydravion Nord 20. Fin 1945, il reprend ses fonctions à Toussus jusqu’à la dissolution de la SNCAC. Il est alors nommé, le 1•, octobre 1949, commandant de l’aérodrome de Melun-Villaroche jusqu’à sa retraite en 1954. Il collabore encore à un avant-projet d’avion conçu par son fils Jean, ingénieur Arts et Métiers, avant que celui-ci ne se tue au cours d’un vol d’essai.
Lucien Coupet décède brutalement à Châteaufort à l’âge de 80 ans, le 16 janvier 1969. Le« père Coupet» tout au long de sa carrière, a volé sur un nombre incalculable d’avions, du planeur au gros avion de transport. Il était unanimement apprécié pour son professionnalisme, son honnêteté, sa loyauté et sa modestie.
Il reçut le brevet de pilote d’essai n°1, attribué en 1953 pour sa compétence et son expérience. Le général De Gaulle lui remit les insignes de grand officier de la Légion d’honneur, le 10 juillet 1964, dans la cour des Invalides.
Souvenirs de Lucien Coupet, chef-pilote Farman à l’aérodrome de Toussus-le-Noble:
« Chez Farman, l’emploi du temps des pilotes était total. Nous faisions la ligne. Nous atterrissions nu Bourget et nous ramenions l’avion à Toussus, car il n’y avait alors aucune installation au Bourget, sinon une petite baraque pour la météo et une autre petite baraque pour la douane et la police.
Au retour de la ligne, nous étions occupés à l’école et aux essais. J’ai ignoré pendant quinze ans, ce qu’était un jour de congé … L’aérodrome n’arrêtait jamais … Les curieux, fort nombreux, venaient voir les avions et nous leur montrions le château de Versailles. Les patrons étaient là eux aussi tous les dimanches …
Entre les records, nous ne nous arrêtions pas de voler. Quand l’avion était prêt, nous tentions le record, puis on nous disait: « allez faire un tour d’école, on a besoin de vous là-bas ». Si en même temps un client se présentait, il fallait lui faire un peu de double commande ou simplement un circuit. Nous avions deux terrains d’essais: Toussus et Mérantais. Nous allions à Orly ou à Villacoublay en avion, le plus souvent en cage à poules, jamais en voiture. C’était l’avion total. ..
… Vous voyez qu’on ne s’ennuyait pas à Toussus, pas davantage au Mérantais ou aux hydravions dont certains utilisaient le fameux étang du Trou Salé. Vraiment, nous n’avions pas le temps de nous ennuyer. »
Extrait D’Azur et d’Or – Centenaire de l’aéroport de Toussus le Noble 2007